En ce jour de Noël, j’ai pensé qu’il serait bon de discuter avec une théologienne de ce que cette année nous a fait vivre, des bienfaits de croire.
Le Blog – Bonjour Laura qui êtes-vous ?
Laura – Bonjour, je suis une expatriée suissesse, d’origine française, vivant en Finlande depuis 2004. Je suis en train de rédiger un mémoire de Master en théologie sur les incidences du Covid-19 dans les milieux ecclésiaux et sur le vivre ensemble.
Le Blog – Oui, le « vivre ensemble » est devenu difficile, les voyages pour voir nos familles si l’on habite à l’étranger. Mais nous sommes quand même privilégiés. Lorsque l’on repense aux pandémies du passé, comme la grippe espagnole, on ne pouvait pas se téléphoner, ou se voir, même si l’on habitait pas loin les uns des autres, comme c’est le cas aujourd’hui avec les moyens de communications moderne, mais revenons-en à vous. Que faisiez-vous avant vos études de théologie ? Comment êtes-vous devenue théologienne et pourquoi ?
Laura – Après des études commerciales et paramédicales et plusieurs années d’activité salariale dans divers milieux tertiaires et suite à un problème de santé, j’ai entrepris des études universitaires pour me réorienter vers la théologie. J’ai en effet constaté dans ma pratique que les besoins spirituels étaient souvent négligés (par exemple dans les soins ou dans les ressources humaines). Ceci, notamment du fait qu’ils sont perçus comme des croyances personnelles et donc relevant de la sphère privée. J’ai donc souhaité acquérir des compétences pour pouvoir ensuite mieux accompagner des personnes qui en feraient la demande.
Et puis les gens qui croient, quelle que soit leur religion ou philosophie guérissent mieux et plus vite ..…….
Le Blog – La prière aussi est une forme de méditation…… mais parlons de la situation actuelle …. que l’on soit croyant ou pas, qu’est-ce que la pandémie du coronavirus a fait surgir dans la vie de chacun ?
Laura – Cette pandémie a chamboulé et affecté le fonctionnement sociétal du monde entier, impactant les vies de chacun, particulièrement parmi les couches les plus fragiles de la population. Elle a fait resurgir les peurs liées à la mort, à la solitude. Elle a rappelé à chaque personne, la fragilité de la vie, balayant l’illusion de maîtrise et d’invulnérabilité et donc sur les interdépendances entre les humains et les différents écosystèmes. Elle a mis en lumière le besoin du lien social mais aussi celui des sensations physiques, que les mesures de prévention ont mis à mal. Elle a rappelé les communautés humaines et la solidarité nécessaire pour survivre, non pas chacun de son côté mais ensemble.
Le Blog – Il est certain que c’est un électrochoc dans nos sociétés modernes que nous considérons comme étant évoluées. Mais quel éclairage peut apporter la théologie sur la façon de comprendre ce qui se passe actuellement et redonner un peu d’espoir à l’approche des fêtes ?
Laura – La théologie moderne est une discipline académique, qui travaille en lien avec d’autres disciplines (histoire, psychologie, sociologie, philosophie et science des religions, éthique, archéologie et qui comprend ses propres champs de recherche). Elle propose donc de fournir des clefs d’interprétation, pour permettre une réflexion sur le monde physique et spirituel. Ainsi, la pandémie ne doit pas être perçue comme un fléau divin, comme ce fut le cas dans l’antiquité et au Moyen-Âge. Mais elle rappelle la précarité humaine, physique, psychique et spirituelle et le besoin de se reconnecter à une communauté non pas numérique, mais physique, à vivre des choses ensemble, à éprouver des sensations, à nous relier les uns aux autres et à ce qui nous dépasse. Elle oblige à s’interroger sur la vraie origine du mal et à prendre ses responsabilités et revenir à l’essentiel, à rejoindre les autres dans leurs expériences, même si on n’avance pas tous au même rythme.
Le Blog – Que souhaitez-vous partager de particulier avec nous ?
Laura – Ne pas renoncer à l’espérance, ne pas rester dans les ténèbres, mais chercher la lumière, l’accueillir et la transmettre. Une lumière faite d’espérance, celle en un monde meilleur. De foi et donc de confiance et d’abandon dans le fait que nous ne pouvons pas tout maîtriser. D’amour enfin, celui qui renonce à soi-même, qui rejoint autrui dans sa précarité. Précarité qui par son étymologie latine rejoint le mot prière. Ce dernier comme lieu privilégié d’accueil, d’humilité, de reconnaissance et de confiance devant un avenir incertain. Une prière n’est jamais adressée à soi-même, mais à quelqu’un : À un Dieu incarné dans l’histoire et dans la vie des hommes par exemple, venant comme un vis-à-vis nous sauver de nous-mêmes. Mais aussi comme un nouveau souffle, pour nous pousser à semer des graines d’espérance, pour plus de justice, plus de partage et plus d’équité. C’est cela aussi le message de Noël.
Le Blog – Oui, Noël est un message d’espoir et de partage pour tous. Je vous remercie, Laura, et je vous propose d’avoir une pensée d’amour pour toutes les personnes qui sont seuls aujourd’hui, quelle que soit la raison, les personnes dont on ne s’occupe plus beaucoup, même en temps normal, ceux que l’on ne va pas visiter, même quand il n’y a aucun risque !
Joyeux Noël à tous et merci à Laura.